Guide du datajournalisme 1.0 BETA

Un indicateur du journalisme en mutation

Le datajournalisme, sous bien des aspects, reprend les fondamentaux du journalisme, tout en exprimant certaines dimensions largement inédites d’une activité en train de se réinventer. En premier lieu, il est question d’informer à partir d’un territoire en expansion constante, celui des données. La question de l’accès à celles-ci est loin d’aller de soi, tant elle représente un enjeu majeur touchant la transparence des institutions et de la vie publique.

Dans le datajournalisme s’exprime d’abord le rôle traditionnel du journaliste : identification de ce qui fait sens du point de vue de l’intérêt général, croisement, vérification, puis hiérarchisation des faits. En même temps, cette recherche et cette vérification, et la conception des moyens qui vont permettre de transmettre l’information au public, passe par une coopération étroite avec un professionnel de l’informatique. Cette dimension du datajournalisme qui repose sur les modalités de la coopération avec un développeur, implique un minimum de compétences dans le domaine de l’informatique, donc une formation adéquate, pour le journalisme lui-même. Enfin, dans la construction d’une narration originale, le binôme journaliste-informaticien s’adjoint le plus souvent l’aide de spécialistes du visuel. C’est dire qu’en plus d’être une forme de collecte et de traitement spécifique de l’information, le datajournalisme participe de la recherche et de l’expérimentation d’une écriture multimédia, de modes de narrations inédits.

Le datajournalisme, qui combine dimensions traditionnelles du journalisme s’appliquant au territoire particulier des données, et compétences propres à l’informatique et au traitement graphique, n’est pas forcément L’Avenir du journalisme, mais certainement l’une de ses dimensions. S’exercera-t-il au sein de chaque rédaction ou dans des lieux mutualisés (sur le modèle de l’agence) ? Le laboratoire que constitue le vécu de nombre de rédactions numériques le révélera progressivement.

Jean-Marie Charon, professeur à l’EHESS